mercredi 15 juillet 2009

RIEN A RACONTER - 1976




Pochette du 33 tours « Rien à raconter ». Seuls « Les vases bleues » et « Rouge-gorge » seront réédité en CD. « Cheval cheval » a fait une apparition discrète dans une compilation CD sortie en 1988 et depuis, aucune nouvele. « Rouge-gorge » et « Les vases bleues » seront incluses - entre autre - dans la réédition en CD de « Il voyage en solitaire », en 1995.


Les vases bleues
Rien à raconter *
La pie noire *
Ailleurs *
Le moment d'être heureux *
La liberté *
Cheval cheval *
Rouge-gorge

Pour répondre à Y a une route et ce qui pouvait être un tremplin commercial pour la suite, Gérard Manset sort Rien à raconter et calme ainsi les ardeurs. Un titre d’album ironique, roublard et froid qui marque l’empreinte Manset. Une occasion de plus pour dire au public que ce qu’il propose n’est pas du mâché, du tout cuit. Sorti en 1976, cet album porte bien en lui la marque «seventies» en proposant, dans une veine folk-rock, une série de chansons non loin de l’univers des premiers albums d’Yves Simon ou du Berlin de Lou Reed. Des chansons thématiques («La liberté», «Ailleurs») suggèrent une certaine évasion face à la tristesse et la monotonie («Rien à raconter» et «Le moment d’être heureux»). Des voyages poétiques, dont les deux merveilles que sont «Les vases bleues» et «Rouge-gorge», titres majeurs de l’œuvre Manset, ouvrent et referment respectivement cet album. Soulignons la qualité du choix de l’ordre des chansons, qui impose une certaine lecture de l’album (qui plus est à l’ère du vinyle).

Comme le sera 2870, son successeur, Rien à raconter est un album de guitare, utilisée sans prétention, elle est parfois à la limite de la justesse, parfois complètement débridée, à l’expression «free». En témoigne le formidable «Cheval cheval» que certains n’hésiteraient pas à qualifier d’expérimental et qui illustre au mieux l’aspect anti-commercial de cet album. Coté textes, on ne peut passer à côté de quelques phrases, tant amères que délicieuses, de ce ton noir et lucide que l’auteur ne cesse d’user, comme «Je suis un animal fatigué qui traîne la patte, laissez passer», («Rien à raconter») ou «Quand tout le monde aura choisi la liberté, quand tout le reste sera écarté» («La liberté»).

Rien à raconter fait partie des albums quelque peu oubliés aujourd’hui. Il n’a pas la notoriété d’un Royaume de Siam ou d’un Lumières, auxquels il n’ a pourtant rien à envier, et reste un album merveilleux à écouter dans son intégralité (version vinyle).

Samuel Bodart

« J'ai choisi " Rien à raconter " par réaction. Sans être maso, il fallait mettre les points sur les "i". Je venais d'avoir un tube (Solitaire). Pour ceux qui me connaissaient avant, c'était sans conséquence. Mais à ceux qui me découvraient avec ce titre, il fallait montrer tout de suite que Manset, ça n'était pas que ça (...) Je devais inoculer le contrepoison. Idem pour le métier... Il ne fallait pas qu'il s'attende à ce que je refasse le même truc. »

Gérard Manset, 1977

« Aujourd'hui, j'ai la voix que je veux. J'ai mis dix ans pour y arriver. Et le bilan, c'est " Rien à raconter ". Où est la découverte d'antan ? Heureusement, j'ai toujours l'inspiration et l'enthousiasme. J'ai aussi atteint une certaine forme de sérénité qui me rend capable d'enregistrer des titres aussi bien réussis que " Rien à raconter " sur une mélodie aussi simple, aussi galvaudée, aussi "bateau". Je suis transporté!

Gérard Manset, 1977


Les vases bleues

A force de penser
Aux autres
On a les dents serrées
La tête haute
Cartes, billes et crayons sont
Le centre du monde
On s’en sert en serrant son
Poing comme une bombe

On marche de travers comme un crabe
Et la mer descend
Adieu les vases bleues
Les pas traînants
Sables mouvants
Sables heureux
Sables de vent
De vases bleues

Comme un casque on s’endort
Avec sa chevelure
Une chemise au corps
Au cœur une blessure
Prisonniers aux pieds pris
Dans le courant qui passe
Une valise pleine ou vide
A marée basse

On marche de travers comme un crabe
Et la mer descend
Adieu les vases bleues, les pas traînants
Sables mouvants, sables heureux
Sables de vent de vases bleues

On marche de travers comme un crabe
Et la mer descend
Adieu les vases bleues
Les pas traînants
Sables mouvants
Sables heureux
Sables de vent
De vases bleues

Hommes, bêtes et femmes sont en guerre
Et la mer descend
Vies perdues dans les vagues de fer
Et la mer descend
On oublie de vider son verre
Et la mer descend
On marche de travers comme un crabe
Et la mer descend
On marche de travers comme un crabe
Et la mer descend
Adieu les vases bleues
Les pas traînants
Sables mouvants
Sables heureux
Sables de vent
De vases bleues
Sables de vent
De vases bleues


Rien à raconter *

Je n’ai rien à raconter
Je vis un éternel été
Ni gris, ni bleu, ni mérité
Qui dure depuis tant d’années

Je n’ai rien à raconter
Je suis l’arroseur arrosé
Le cordonnier le plus mal chaussé
Le chien auquel on passe un collier

Je n’ai rien à raconter non plus
Aux autorités, je n’en peux plus
Je suis un cheval fatigué
Qu’on mène à la salle des pas perdus

Je n’ai rien à raconter, tant pis
A l’humanité, j’ai rien compris
Je suis un animal fatigué
Qui traîne la patte, laissez passer

Je n’ai rien à raconter
Les faits divers, les nouveautés
Le Figaro, l’Humanité
Voyez la personne à côté

Je n’ai rien à raconter
J’ai rien voulu, rien demandé
Je ne suis pas, je n’ai pas été
Ni l’inventeur, ni l’inventé


La pie noire *

Cueille les fruits de ton verger
Laisse la pie noire s’envoler
Amène l’eau, amène-les
Sur une chaise et mange-les

Cueille les fleurs de ton quartier
Laisse les couloirs, les fumées
Qu’arrive-t-il au monde entier
Depuis ce matin ?

Un homme au visage allongé
Dans une ville, découragé
Parle l’homme sans bouger
Laisse l’habit noir à ses pieds

Chaud le soleil et chaud l’été
Sous une tonnelle ombragée
Qu’arrive-t-il au monde entier
Depuis ce matin ?

Vis dans la campagne, oublié
Cueille les fleurs de ton verger
Et quand la neige aura neigé
Laisse la pie noire s’envoler

Qu’arrive-t-il au monde entier
Depuis ce matin ?


Ailleurs *

Ailleurs, ailleurs
Ailleurs, on croit, le monde est meilleur
Et rien ne fait peur, rien ne fait peur
Ailleurs, on croit, le monde est meilleur, meilleur
Ailleurs, on croit, le monde est bien meilleur
Y a pas de vélomoteurs
On se lève de bonne heure
On est de bonne humeur
On vit, on meurt
Et personne ne pleure
On fait des colliers de fleurs
Et les enfants chantent en chœur

Ailleurs, ailleurs
Ailleurs, on croit, le monde est meilleur
Et rien ne fait peur, et rien ne fait peur
Ailleurs, on croit, le monde est meilleur, meilleur
Ailleurs, on croit, le monde est bien meilleur
Y a pas de détracteurs
Pas d’objets de valeur
Pas de cambrioleurs
On vit, on meurt
Y’a personne qui pleure
On fait des colliers de fleurs
Et les enfants chantent en chœur

Ailleurs, ailleurs
Ailleurs, on croit, le monde est meilleur
Et rien ne fait peur, rien ne fait peur
Ailleurs, on croit, le monde est meilleur, meilleur
Ailleurs, on croit, le monde est bien meilleur
On parle avec les pêcheurs
De coquillages et de fleurs
De poissons de couleur
Les enfants jouent pendant des heures
Mais aucun ne pleure
Y a ni vaincus ni vainqueurs
Et tout le monde chante


Le moment d’être heureux *

Quand on est malheureux
Quand il faut fermer les yeux
On sait bien qu’un jour, tout changera
On sait bien qu’un jour, il reviendra
Le moment d’être heureux
Le moment d’être enfin deux
Le moment d’être enfin heureux
Le moment d’être heureux

Quand on est malheureux
On se tait ou on parle peu
On sait bien qu’un jour, tout changera
On sait bien qu’un jour, il reviendra
Le moment d’être heureux
Le moment d’être enfin deux
Le moment d’être enfin heureux
Le moment d’être heureux

On sait bien qu’un jour, il reviendra
Le moment d’être heureux
Le moment d’être enfin deux
Le moment d’être enfin heureux
Le moment d’être heureux

Quand on est tous les deux
On se regarde dans les yeux
On sait bien qu’un jour, on sera vieux
Et qu’il reviendra pour tous les deux
Le moment d’être heureux
Le moment d’être enfin deux
Le moment d’être enfin heureux
Le moment d’être heureux




La liberté *

Quand tout l’ monde aura choisi la liberté
On aura plus besoin de papiers
Pour faire signer les gens, les idées
Les hommes et les femmes entre eux
Les hommes jeunes, les hommes vieux
Les éternels miséreux
Les malheureux

Quand tout le monde aura choisi la liberté
Quand tous les autres se seront écartés
Ecartés

Quand tout le monde aura choisi la liberté
Quand tu seras toi du bon côté
N’ sois plus jamais debout le dernier
Les hommes et les femmes non plus
Les hommes riches et ceux qui n’ont plus rien
Les éternels miséreux
Les malheureux

Quand tout le monde aura choisi la liberté
Quand tout le reste sera écarté, écarté
Quand tout le monde aura choisi la liberté
La liberté
La liberté




Cheval cheval *

Cheval d’hier
Avec tes yeux verts
Cheval d’un soir
Avec tes yeux noirs
Cheval, cheval
Pour ce que les hommes valent

Cheval, cheval
Chevaux, chevaux
Evite-le bien, ce lasso
Ta crinière, tes yeux de veau
Le grand dessin de ton manteau
La fumée sort de tes naseaux

Cheval, cheval
Chevaux, chevaux
Evite-le bien, ce lasso
Quelqu’un derrière un rideau
T’a vu passer, pris dans ton dos
Cheval, cheval
Chevaux, chevaux

A côté d’un cheval, qui de nous
Peut vivre un seul instant sans se rompre le cou ?
A côté d’un cheval, qui de nous
Peut vivre quand quelqu’un le tient par le cou ?
Non, non, non
Non, non, non
Non, non, non
Non, non, non

A côté d’un cheval qui tombe à genoux
Tu verras qu’il se tient beaucoup mieux que nous
A côté d’un cheval qui comprend tout
Tu peux monter dessus
Tu peux monter dessous
Non, non, non
Non, non, non
Non, non, non
Non, non, non

Non, non

A côté d’un cheval, qui de nous
Peut vivre un seul instant sans se rompre le cou ?
A côté d’un cheval, qui de nous
Peut vivre quand quelqu’un le tient par le cou ?
Non, non, non
Non, non, non
Non, non, non
Non, non, non




Rouge gorge

Rouge-gorge
Ouvre ta gorge, rouge-gorge
Viens manger du pain
Dans la main
De celui qui t’aime
Ouvre tout grand les ailes
Et vole ainsi au-dessus
Des moulins
De la vie, de la vie
De la vie, de la vie
De la vie, de la vie
De la vie, de la vie
De la

Rouge-gorge
Ouvre ta gorge, rouge-gorge
Continue de chanter l’été
La gorge serrée
Ouvre tout grand les yeux
A mille lieux au-dessus
Des jardins
De la vie, de la vie
De la vie, de la vie
De la vie, de la vie
De la vie, de la vie
De la
De la

Rouge-gorge
Gorge rouge et fatiguée
Combien faudra-t-il te donner
Pour que tu puisses monter
En haut de l’escalier
Du dernier des paliers alignés ?
De la vie, de la vie
De la vie, de la vie
De la vie, de la vie
De la vie, de la vie
De la

Rouge-gorge
Ouvre ta gorge, rouge-gorge

Rouge-gorge
Ouvre ta gorge, rouge-gorge
Viens manger du pain
Dans la main
De celui qui t’aime
Ouvre tout grand les ailes
Et vole ainsi au-dessus
Des moulins
De la vie, de la vie
De la vie, de la vie
De la vie, de la vie
De la vie, de la vie
De la

Rouge-gorge
Ouvre ta gorge, rouge-gorge

Rouge-gorge
Ouvre ta gorge, rouge-gorge

Rouge-gorge
Ouvre ta gorge, rouge-gorge

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