jeudi 16 juillet 2009

Le langage oublié

Un jour le soleil passe
Le soleil est passé
Et puis l’ombre s’installe
Grandit de tous côtés
Rose
Dont les pétales
Ont jailli un matin
Ont jailli un été
Se souviennent et se taisent
Et gardent ce venin
En eux, profondément

Qui saurait lire encore cette langue oubliée
Dont l’encre même a l’air d’avoir fondu
D’avoir rongé le centre du cahier
Qu’elle avait laissé là un jour lointain

Il s’est levé ce malade inconnu
Et le voilà parti par son chemin
Sans avoir ni touché à rien, ni même bu
Il s’est levé sans avoir répondu

Ce langage oublié quelqu’un le saurait-il
Qui rendait parait-il heureux le genre humain
Aujourd’hui c’est hier, hier c’était demain
Il suffit de s’asseoir et de guetter
Il suffit de s’asseoir

Qui parle encore cette langue oubliée
Par laquelle nous nous étions connus
Dont il ne reste, en partie dépecés
Qu’un songe, qu’une illusion, qu’un rêve

Le malade se tait, ne répond pas
De sa bouche aujourd’hui toute édentée
A-t-elle connu quelques jolis baisers
Comme une eau pure, comme une coupe fraîche
Comme un murmure

Qui parle encore ce langage inconnu
Par lequel nous nous étions trouvés
Et découverts ensemble
Comme une eau pure, comme une coupe fraîche,
Comme un murmure

Aujourd’hui c’est hier, hier c’était demain
L’homme et la femme allaient main dans la main
Le malade se tait, ne répond pas
L’homme et la femme allaient
Au même pas
Au même pas

Qui parle encore cette langue finie
Ni ailleurs ni là-bas, pas plus ici
Pas plus vers les confins que tout en bas
Ni langage ni rien, pas plus de forme
Etait-il de Sumer ou bien cunéiforme
Ce langage
Ce langage

Qui dit qu’un coeur dans un vase fermé
Comme une fleur pourra se ressaisir
Avec un peu de pluie ou d’eau, ou de plaisir
Avec un peu de temps, d’éternité

Ce langage oublié quelqu’un le saurait-il
Aujourd’hui c’est hier, hier c’était demain
L’homme et la femme allaient
L’homme et la femme allaient par le même chemin
Où nous seront nous-même
Un jour
De nouveau

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